Sommaire : croix de chemins, croix des rogations
et de processions, croix de limites, croix de villages et de cimetières,
croix des ponts, des sommets, des sources et des fontaines, croix de
mémoire.
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menhir christianisé
de Sériers
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1 - Croix de chemins
Le premier rôle d'une croix est de christianiser un lieu. Les croix de
chemins témoignent donc avant tout de l'avancée du christianisme et de
la présence de l'Église. C'est ce qui explique qu'un nombre important de
menhirs ont été christianisés par l'adjonction d'une croix. On a dit que
les autorités religieuses avaient cherché à détruire ces monuments
pré-chrétiens; c'est en effet ce que plusieurs conciles ordonnent, mais,
le plus souvent, on préféra récupérer ces objets de culte : il
suffisait d'en changer la destination.
Les carrefours ont toujours fait l'objet d'une attention particulière.
Il y a, en effet, un symbolisme de la croisée des chemins, et souvent les
carrefours provoquent ce que l'on nomme chez nous une "peur". La
croix fait donc office ici de talisman. Il ne faut pas négliger pour
autant un rôle plus prosaïque d'indicateur : quand le croisement est
sous la neige, la croix continue d'indiquer sa position.
Enfin, un certain nombre de croix de chemin sont aussi des croix sur la
voie des morts. De la maison du défunt à l'église paroissiale, le convoi
funéraire s'arrêtait à toutes les croix et l'on récitait quelques prières
appropriées.
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Croix aux Gardes,
à Saint
Jacques
des Blats
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2 - Croix des Rogations et de processions
Certaines croix de chemins servaient aussi aux processions, et
notamment aux Rogations, fête aujourd'hui bien oubliée mais essentielle
en milieu rural.
Les
Rogations constituaient une fête liturgique s’échelonnant sur trois
jours, du lundi au mercredi précédant l’Ascension. Ces Rogations, ou
litanies mineures, furent instituées en 469 par saint Mamert, évêque de
Vienne en Dauphiné. Grégoire de Tours nous informe que l’usage fut
introduit très tôt en Auvergne.
Curé en tête, la procession des paroissiens
traversait le terroir de part en part, s’arrêtant aux croix pour bénir
les prés et les champs.
Chaque journée était consacrée, en principe, à la bénédiction d’un
type particulier de culture : prés, champs, vignes ou quelque autre
culture secondaire. Le but était évidemment de garantir, par des prières
adéquates, la prospérité de la communauté villageoise en immunisant
ses diverses productions contre les attaques des forces obscures. C’est
pourquoi il importait aux paysans de disposer des croix aux endroits stratégiques,
certes au bord des chemins, mais donnant sur les prés et les
cultures.
Il
y avait cependant beaucoup d'autres occasions de fleurir les croix, car
les processions étaient nombreuses.
A
partir du XVIIIe siècle surtout, les Missions se multiplient dans les
paroisses. Là encore on processionne largement puis, pour fêter
dignement la clôture de la Mission, on érige une croix dans un grand concours
de foule.
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Croix de La
Planoune,
à Condat, avec
les armes de
l'Abbé de Féniers
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3 - Croix de limites
La croix, comme le menhir avant elle, peut servir de borne. Entrée et
sortie des villages sont normalement pourvues d'une croix, mais toutes les
limites, religieuses ou profanes, pouvaient être ainsi matérialisées.
Aux XIe et XIIe siècles, des Sauvetés sont crées et délimitées par
des croix (Aurillac, Maurs, Montsalvy, Sauvat). Ces Sauvetés sont des
terres d'asile qui ne dépendent que du fondateur, Abbé ou Pape. En
réalité, il s'agissait ainsi d'attirer des travailleurs pour mette en
valeur des terroirs encore inexploités. Les textes indiquent clairement
la présence et le rôle juridique des croix.
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Cimetière de
Saint-Cernin
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4 - Croix des villages et des cimetières
Chaque village, on l'a dit, s'ouvre et se ferme par des croix (du moins
en terre catholique). Mais les places sont également christianisées,
ainsi que les cimetières.
Nous savons que les cimetières se trouvaient tous, originellement, à
proximité immédiate de l'église. Ce n'est qu'à la fin du XIXe siècle
que la nouvelle "morale" de l'hygiène les a rejetés à
l'extérieur des bourgs. La croix qui trônait au centre du champ des
morts a pu faire le même voyage, ou bien est restée sur place pour
devenir une "croix d'église".
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Croix de Saint-Maurice
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5 - Croix des ponts, des sommets, des sources et des
fontaines
Chaque point important du paysage fait l'objet d'une
christianisation.
Les ponts sont des points de passage obligés, et souvent étaient le
lieu d'un péage. Une croix pouvait garantir (en théorie) la légitimité
de cet impôt. Malheureusement les ponts anciens sont extrêmement rares
aujourd'hui : Saint-Flour, Allanche, Saint-Simon.
Presque tous les sommets, en revanche, ont conservé une croix. Le rôle
de christianisation, de signal ou de rappel est ici évident.
Enfin, les sources et les fontaines ont également reçu la marque du
christianisme. D'abord parce que l'eau a toujours été sacrée, ensuite
pour combattre (et en fait récupérer) les cultes antérieurs.
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Place de
Saint-Jacques-des-Blats
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6 - Croix mémoriales
Pour terminer ce panorama, rappelons qu'un grand nombre de croix
servent de témoins. C'est ainsi que le lieu d'une mort brutale, ou au
contraire d'un coup de chance, font l'objet d'une érection de croix. Dans
le même registre citons les croix de peste, qui rappellent (et conjurent)
une épidémie, ou les croix de pèlerinage, qui le plus souvent ne marquent
pas une étape sur un trajet, mais rappellent le pèlerinage du donateur.
Certaines "croix des batailles" se souviennent seules, et
confusément, d'un conflit.
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Une brève histoire des croix
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